Nicolas Stromboni : un passeur corse en Champagne


Nos lecteurs connaissent Nicolas Stromboni, créateur du Chemin des Vignobles à Ajaccio, “Caviste de l’année 2011”, auteur du livre “Du pain, du vin et des oursins” sur la gastronomie de l’île. Jusqu’en 2011, il accompagna de jeunes pousses corses, les Vaccelli, Venturi, Giudicelli ou Sant’Armettu, tous devenus célèbres aujourd’hui.

C’est pourtant loin d’Ajaccio, devant la gare de Romilly-sur-Seine, que Nicolas Stromboni, 50 ans, m’attend dans sa Volvo crème. Nous sommes au sud de la Champagne crayeuse, celle que l’on appelait jadis “sèche” ou “pouilleuse” et que lui, dans sa nouvelle classification, a rebaptisée “Champagne médiévale”.

En écoutant Pink Floyd

Quelle mouche a piqué Stromboni ? Touché par l’histoire, les hommes, la grâce des vins de Champagne, “le Corse” veut refaire ce qu’il a accompli il y a vingt-cinq ans sur son île : épauler des jeunes à potentiel mais méconnus car loin des Grands crus de la Montagne de Reims ou de la Côte des Blancs. « On pense que tout a été fait en Champagne, j’ai l’intuition que tout reste à faire », assure-t-il.

Première étape dans le Sézannais, à Fontaine-Denis, chez les frères Collet. Thomas et Florent sont en bio depuis huit ans. On déguste Nord Sud en écoutant Pink Floyd, puis Silex & Craie. Oh ! la remontée du sol dans le cœur de bouche… Viennent les amers de Pierre Noire, le chardonnay Wellington, le zéro dosage Nakaï, les lieux-dits Guyottes puis Coutinaux, désormais vinifiés à part. Stromboni a convaincu les deux frères de redécouper leur parcellaire, de changer le nom de leurs cuvées, de révolutionner leurs étiquettes.

À ses jeunes protégés, ils sont douze, “le Corse” propose un travail d’introspection : « Où veux-tu aller ? ». Dialogue, écoute, analyse. Suit l’élaboration d’une stratégie en “cinq piliers” : la vigne, la cave, l’administration, le commerce, la famille. « Je mets le doigt sur les incohérences puis j’essaie d’impulser les changements et de la solidité dans le temps », résume le sorcier corse.

Tête chercheuse

Nous filons chez Julien Boonen, près du cirque de Festigny. La Côte du Châtaignier, vous connaissez ? Boonen y travaille deux parcelles. Pour Stromboni, c’est « le Corton-Charlemagne de la Vallée de la Marne ». Ni plus ni moins. Mordu du meunier, Boonen sert sa cuvée CPTS (Ça passe tout seul), Le Cirque, Le Zèbre (50 % chardonnay, 50 % meunier). Excellent niveau.

On passe à Cuisles, chez Cédric Moussé. Un découvreur : Cédric travaille en ce moment sur le soufre de mine, qui combine plus vite sans durcir les bouches. On goûte Les Terres d’Illite, Les Fortes Terres, L’Esquisse, Eugène, L’Orage… Et puis on mange : Moussé a installé chez lui une table d’hôtes de 22 couverts avec cuisine pro et deux chefs, dont un Japonais. Cédric Moussé mérite une étape !

Boonen, Moussé, Faivre…

Nous voici à Belval-sous-Châtillon, le secteur le plus froid de la Champagne, chez David Faivre. Son père livrait ses raisins chez Jacquart et Castelnau. Le fils a repris les six hectares, riches en argiles vertes. Les notes d’amande et de calisson de son blanc de blancs extra-brut Les Champs de Romy, il faut goûter ça !

Les Frères Collet, Julien Boonen, Cédric Moussé, David Faivre, vous connaissiez ? Pour “le Corse”, ils sont l’avenir de la Champagne des 300 villages. « Jusqu’alors, seuls les chefs de cave des grandes maisons connaissaient les spécificités de ces terroirs pour leurs assemblages. Nous, on les identifie pour mieux mettre en avant les vignerons », promet-il. Le caviste d’Ajaccio vit désormais quinze jours par mois à Hautvillers où il a acheté une maison.



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